Louis Renault, collabo ? (suite)

Dernière minute, la décision du tribunal :

Le 11 janvier 2012 le Tribunal de Grande Instance de Paris s’est déclaré incompétent sur la demande de réparation suite à la nationalisation de 1945, estimant que celle-ci n’étant pas de nature législative mais administrative. De ce fait il ne peut transmettre la question prioritaire de constitutionnalité. Rappelons que le Tribunal administratif a déjà tranché sur l’irrecevabilité de la demande en 1959 et 1961. Il s’agit donc d’une première victoire, mais restons vigilants, il serait surprenant que les héritiers Renault en restent là.


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Louis Renault

Dans le précédent numéro de Mémo Luttes, nous avions consacré un dossier à ce sujet, dossier qui ne laissait aucun doute quant à la responsabilité de Louis Renault dans la collaboration avec l’ennemi.

Le procès intenté par les héritiers Renault a connu un nouveau rebondissement le 14 décembre, puisque le matin avait lieu au Palais de Justice de Paris une audience pour se prononcer sur la compétence du tribunal à juger de cette affaire et sur l’opportunité de saisir le Conseil constitutionnel. Le soir même sur France 3 avait lieu la diffusion d’un film intitulé Louis Renault et André Citroën, film suivi d’un débat en présence des héritiers de Louis Renault et de deux historiens sensés avoir travaillé ce dossier.

Considérant qu’aucun des historiens qui s’étaient prononcés sur l’évidence de la culpabilité de Louis Renault n’avait été invité à cette émission, des associations sont intervenues auprès du président de France 3 pour lui signaler ce déséquilibre et lui demander de bien vouloir y remédier. M. Pflimlin, président de France 3, opposa à cette demande un refus poli.

Au cours de l’audience, les petits enfants de Louis Renault ont précisé que ce qu’ils demandaient c’était une indemnisation de l’État pour avoir été spoliés de leur héritage, suite à la décision prise à la libération, de nationaliser les usines Renault et que la question de la réhabilitation de leur Grand-père ne se posait pas puisque ce dernier n’avait jamais été jugé ni condamné pour quoi que ce soit (pour mémoire, il est mort en prison avant son procès).

L’avocat du Trésor public, de son côté, a rappelé les conditions de légalité de l’ordonnance de 45, sur la nationalisation, celle-ci ayant été prise dans les conditions de la Libération où en l’absence de parlement élu, c’était le Gouvernement provisoire de la République qui légalement avait force de loi ; et de rappeler que déjà le fils de Louis Renault en 1959 et 1961 avait saisi le tribunal sur cette question et qu’il avait été débouté de sa demande.

Au cours de l’émission de télévision du soir même, les petits enfants de Louis Renault ont joué leur partition habituelle, à savoir que leur grand-père n’avait jamais accepté de collaborer de son plein gré et qu’il y avait été contraint par les autorités allemandes. Les deux historiens présents furent bien discrets sur le rôle de Renault dans la collaboration et particulièrement muets sur la répression exercée dans les usines Renault à l’encontre des résistants. En revanche ils durent concéder que Renault n’avait pas eu l’attitude favorable à la résistance, qu’avaient eue à la même époque et dans des circonstances identiques, Citroën ou Peugeot. C’était bien le moins qu’ils pouvaient dire !
Le jugement est mis en délibéré au 11 janvier 2012.